The Retirement House : prendre le contrepied de son industrie
Comment un crew d'octogénaires a créé une niche cool dans une industrie poussiéreuse
Bienvenue aux 65 lecteurices qui nous ont rejoint depuis la dernière édition ! Yannick, Victoria, Isham, Armelle, Inès et tous les autres ! Dans chaque newsletter, je décortique les secrets de la stratégie d’une marque de référence, pour t’aider à créer une marque culte ✨
Hello,
Comment vas-tu aujourd’hui ?
De mon côté, l’emménagement alsacien poursuit son cours, avec la (douloureuse) recherche d’un appart. C’est le jeu !
Il y a 10 jours, je suis aussi passée à Paris à l’occasion d’une soirée organisée par la MAIF et Woombat Connection, pour parler du pouvoir des communautés et de comment trouver sa propre tribu. Un bel événement, qui m’a rappelé la puissance des rencontres en présentiel ✨
La semaine prochaine, j’interviendrai à l’occasion de l’Intelligence Marketing Day à Lyon ! Je t’y croise ?
En attendant, je te propose dans cette édition de parler d’un sujet qu’on met souvent sous le tapis - ou qu’on traite de manière très (trop) clichée : les vieux. Je t’emmène dans les dessous de la silver economy et de The Retirement House, le collectif d’octogénaires le plus swag du moment ! 😎
PS : suite aux votes pour les prochains sujets de la news, j’ai pris contact avec Alan - une édition arrive bientôt !
Bonne lecture,
Noémie
Temps de lecture : 17 minutes
Il y a quoi dans ce case study ?
Les vieux et le marketing : histoire d’une vaste incompréhension
La Retirement House : une réponse osée aux clichés sur l’âge
Bifurquer loin de la norme : un modèle de succès pour toutes les industries
3 principes pour reprendre les clés du succès de The Retirement House
Le sponsor de cette édition : 18h08, l'agence d'influence qui remet du sens dans le marketing
[Cadeau] 10 stratégies pour réussir ta campagne d'influence, par 18h08
Le marketing d'influence, c'est comme le dating : avant de se lancer, mieux vaut choisir le(s) bon(s) partenaire(s) et les bonnes modalités. Les exemples de marques ayant suscité la controverse ou la colère de leurs audiences, suite à un partenariat peu judicieux (tu te souviens de Pepsi et Kendall Jenner ?) sont nombreux et font trembler les marketeux. Tu as envie de tester l'influence, mais tu ne veux pas te prendre les pieds dans le tapis ? J'ai pile poil ce qu'il te faut ! 10 stratégies pour réussir sa d'influence, exemples et chiffres à l'appui. Stratégie du buzz, co-création, ambassadeurs... Inspire-toi de marques comme Décathlon ou Le Vieux Campeur, pour te lancer sans stress. Ce guide est offert par 18h08, le sponsor de cette édition. 18h08 est une agence spécialisée dans l'influence, qui remet du sens sur ce marché de l'influence. En plus, ils sont Marseillais. Que demander de plus ?
The Retirement House : un positionnement puissant, à contre-courant
Les vieux et le marketing : histoire d’une vaste incompréhension
Dans le marketing, tout est une question de sensibilité et d’interprétation.
Mais s’il y a un truc sur lequel je suis certaine à 100 % que tu seras d’accord avec moi, c’est que généralement, les pubs s’adressant aux seniors sont boring à souhait et complètement déprimantes ! Et celles qui s’adressent aux personnes s’occupant de seniors dépeignent ces derniers de manière complètement déprimante.
La manière dont nous représentons les vieux et la vieillesse en dit long sur notre terreur liée à l’âge (et sur les biais de genre qui y sont associés, au passage, mais c’est encore un autre sujet).
Pourtant, c’est un marché juteux : avec le vieillissement de la population généralisé, rien qu’en France, dans les 40 prochaines années, l’INSEE prévoit un doublement de la population des plus de 75 ans, soit 13,7 millions de Français et Françaises en 2070. Ça fait un sacré paquet.
Et franchement, qu’on se le dise : aujourd’hui, malgré les avancées de la science et de la médecine, on vieillit mal. Et surtout, on vieillit isolé, avec pour seule compagnie les clichés liés au statut de senior.
Selon Maddyness, une étude des Petits Frères des Pauvres sur l'isolement des personnes âgées en France aurait révélé que 6,5 millions de personnes sont touchées par un profond sentiment de solitude, dont au moins 500.000 sont en situation de mort sociale. En France (comme un peu partout en Europe et aux US), on ne veut pas voir les vieux. On les cache dans des maisons de retraite et on les isole complètement de la société de consommation en les représentant de manière totalement erronée.
Car au-delà de l’isolement, la représentation des vieux dans notre imaginaire collectif est généralement loin d’être reluisante. D’ailleurs, les vieux justement ne s’y retrouvent pas vraiment : selon La Réclame, 20% seulement des plus de 65 ans s’identifient aux personnages mis en scène dans les publicités, alors que 80% ressentent un constant stéréotypage.
Il suffit de faire un tour dans une pharmacie pour s’en rendre compte : couleurs et packagings fades, mises en scènes complètement hors-sol (la mamie parfaitement brushée, entourée de ses 5 petits-enfants tous blonds et en polo Ralph Lauren)…
Une pub récente de La Poste tombe aussi dans ces clichés, présentant un petit papy tout ridé, aux allures d’Einstein fou, qui passe son temps à se cogner partout.
Et encore, ces cas ont le mérite de cibler directement les seniors : souvent, les marques ne s’encombrent pas de cet objectif et s’adressent directement aux membres plus jeunes de la famille ou aux aidants - n’hésitant pas à présenter les vieux comme « encombrants », « fragiles » ou « dénués de bon sens ».
Bref - tu l’auras compris : les vieux et le marketing, aujourd’hui, c’est loin d’être une histoire qui roule. Pourtant, la silver economy (ou économie des seniors) est un marché plein de promesses, qui pourrait valoir plus de 130 milliards d’ici 2030. Mais clairement pas si les marques investissant ce secteur prometteur continuent de traiter leur cible principale avec aussi peu de considération et surtout, de fantaisie.
Car oui : les seniors peuvent aussi en faire preuve et se révéler complètement déjantés. C’est en tout cas ce que j’ai réalisé en découvrant la Retirement House sur Instagram. Ce collectif de papys et mamies est allé complètement à contre-courant des codes de la silver economy, en reprenant le concept des TikTok Houses (généralement destiné à des jeunes influenceurs de 18 ans), et en explosant tous les compteurs sur les réseaux sociaux.
Je te propose de découvrir leur histoire et les leçons à tirer de ce positionnement malin 👇
La Retirement House : une réponse osée aux clichés sur l’âge
Concrètement, The Retirement House, c’est quoi ?
Eh bien, c’est une TikTok House… mais avec des seniors.
Les TikTok Houses - désormais plutôt appelées Content Houses - sont un concept qui consiste à rassembler des jeunes créateurs qui vivent et collaborent sous un même toit, en créant du contenu et en se mettant en scène. Une sorte de Loft Story (sans les dérapages de Loana et Jean-Édouard - si tu n’as pas la réf je vais me sentir vieille), revisitée à la sauce Gen Z.
L’objectif des TikTok Houses est de multiplier l’audience et l’influence de chaque participant en mettant leurs forces en commun. Le modèle a été popularisé il y a quelques années par des groupes de teenfluenceurs investissant des maisons à Los Angeles comme la Hype House ou la Sway House, qui cumulent respectivement 5 millions et 1 million de followers sur Insta.
Autrement dit, les Content Houses fonctionnent comme des incubateurs de talents, incitant leurs habitants à collaborer pour créer des contenus viraux et attirer plus de visibilité collective.
Les membres développent des communautés de fans, et leurs profils et leurs collaborations ne sont pas sans me rappeller les dynamiques des boys et girls bands.
Et là où ça devient intéressant, c’est que The Retirement House a décidé de reprendre ce format à son compte en ajoutant une touche unique : l’âge de ses participants.
Larry, Curtis, Mabel, Eugene, Rose et Bubbe sont six acteurs - âgés de 70 à 85 ans - qui ont emménagé dans les hauteurs de Pasadena, en Californie, et créent du contenu lifestyle partagé à leurs 1,8 millions de followers sur Insta.
L’histoire commence en septembre 2021, lorsque les réalisateurs et scénaristes Brandon Chase et Adi Azran décident de lancer la Retirement House avec le casting des 6 fringants seniors que je viens de te présenter.
Le contenu est à moitié scripté, et va de conseils en dating à des chorés enflammées (mais arthrose-friendly), en passant par des memes, des photos lifestyle en bord de piscine et des récits personnels racontés par chacun des membres du crew.
Très vite, la sauce prend. Elle prend très bien, même ! Les chiffres sur les réseaux laissent rêveur : 6 millions de followers sur TikTok, 2 millions sur Insta, 43K sur leur chaîne YouTube, un podcast sur Spotify produit par Flighthouse Media…
Les pépés et mémés de la Retirement House deviennent rapidement des stars. Eugene, Rose et les autres sont attachants, entiers, et leurs followers les adorent.
À tel point que les producteurs déclareront dans une interview donnée au New York Post que « la série devait être plus scénarisée, mais nous nous sommes rendu compte qu'il était préférable que les acteurs donnent leur propre point de vue sur tous les sujets. »
Et c’est précisément là que la magie a opéré. En déviant du script initial, pensé par des mecs de 25 et 27 ans pour des octogénaires (et donc forcément complètement bourré de biais), Brandon et Adi on pris le contrepied des habitudes du secteur : ils ont donné carte blanche aux premiers intéressés.
Résultat : du contenu incarné, drôle, authentique, qui ne sonne pas fake et n’est pas trop lisse.
Avec des vidéos humoristiques et bourrées d’autodérision mais aussi de sincérité concernant la réalité des seniors, The Retirement House captive non seulement un public âgé (enfin, la part qui sait aller sur Insta & TikTok), mais aussi des jeunes séduits par cette rupture des codes habituels.
La zone de génie de leur marketing est juste là : avoir trouvé une dynamique où l’âge n’est plus un frein à la créativité et à l’originalité.
Bifurquer loin de la norme : un modèle de succès pour toutes les industries
Cette approche, qui a fait (selon moi) le succès de The Retirement House, va bien au-delà de la silver economy. Le secret qui permet à ses représentants de se connecter aux différentes générations ? L'humour et la sincérité.
Plus globalement, l’approche de Larry, Curtis, Mabel, Eugene, Rose et Bubbe repose sur plusieurs piliers qui peuvent t’inspirer, quel que soit ton secteur d’activité :
L’authenticité : les membres de The Retirement House reprennent souvent des vidéos virales à leur compte, mais ne se contentent pas de suivre les tendances : ils apportent leur touche personnelle, souvent pleine de malice et même d’une petite touche d’impertinence. C’est cette authenticité qui séduit leurs followers.
L’humour : ils explosent les stéréotypes liés à l’âge en s’amusant avec, en créant un contenu léger et en racontant la vieillesse de manière inhabituelle (et plutôt cool, qu’on se le dise).
L’inclusivité : le fait de voir des seniors réussir à ce point dans un espace largement dominé par les très jeunes prouve que la diversité (d’âge, de genre, d’origine) peut apporter une richesse incroyable à un positionnement de marque.
3 principes pour reprendre les clés du succès de The Retirement House
Que tu évolues ou non dans la silver economy, tu as forcément observé des clichés, des normes et des représentations stéréotypées dans ton industrie (ou dans la représentation de ton persona).
Bonne nouvelle : pour revitaliser ton approche du marketing et te différencier, il y a quelques principes que tu peux piquer aux fringuants octogénaires de The Retirement House :
#1. Renforce l'authenticité de ta marque à travers du contenu participatif
L’authenticité est au cœur du succès de The Retirement House. Les membres n’hésitent pas à jouer avec les codes des réseaux sociaux tout en y intégrant leurs propres vécus et personnalités (et leurs problèmes de genoux), en créant un contenu qui sonne vrai.
💡 Comment l’appliquer ? Tu peux inciter ton audience à participer directement à tes campagnes. En lançant, par exemple, un challenge basé sur des retours d’expérience réels (comme un concours de POV), ou en leur donnant la parole et intégrant leurs témoignages dans tes communications. Cette approche humanise la marque et la rapproche de son audience.
⚡️ L’exemple qui claque : Dove a appliqué cette stratégie avec sa campagne “Real Beauty Sketches”, en laissant les consommatrices partager leur vision d’elles-mêmes et en la comparant à la perception des autres. Cela a résonné profondément et renforcé l’image de Dove comme une marque authentique.
#2. Joue la carte de l’humour pour désamorcer les sujets sensibles
The Retirement House fait un véritable pied de nez aux clichés sur les seniors, en utilisant notamment l’autodérision et le second degré. Le contenu est à la fois drôle et touchant, permettant à un large public de s’identifier et de sympathiser.
💡 Comment l’appliquer ? Introduis de l’humour dans tes communications, surtout si tu bosses dans un secteur où on ne l’attend pas. Tu peux aussi prendre un stéréotype ou un cliché de ton secteur et le tourner en dérision pour capter l’attention d’un large publoc.
⚡️ L’exemple qui claque : La campagne “Dumb Ways to Die” du métro de Melbourne en Australie, qui visait à sensibiliser aux dangers ferroviaires avec des animations absurdes et humoristiques, a explosé les attentes. L’humour décalé a touché un large public et rendu la sécurité attractive et mémorable.
#3. Propose une diversité inclusive qui va au-delà des stéréotypes
L’une des forces de The Retirement House ? Briser les stéréotypes liés à l’âge en montrant des seniors actifs, créatifs et connectés. Le contenu créé est intergénérationnel et extrêmement embarquant pour toutes les générations.
💡 Comment l’appliquer ? Réfléchis à des manières de diversifier les représentations de ton persona dans ton contenu marketing. Si tu es dans une industrie avec des stéréotypes établis (que ce soit sur l’âge, le genre, ou l’ethnicité), casse ces codes en montrant une diversité authentique. Par exemple, en intégrant des influenceurs seniors, ou d'autres profils sous-représentés.
⚡️ L’exemple qui claque : Gap s’était distinguée en 2017 en mettant en scène dans l’une de ses pubs une jeune mannequin de 11 ans atteinte de vitiligo - une condition dermatologique alors tabou et aujourd’hui bien plus normalisée.
The Retirement House nous offre une belle leçon de marketing : se démarquer en embrassant la diversité, en humanisant les messages à travers du User Generated Content, et en offrant une plateforme aux voix souvent sous-représentées est une belle clé du succès. Et ça fait du bien ✨
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Noémie
J'adore le concept je connaissais pas du tout ! En plus c'est trop notre idée avec mes potes sans enfants : faire une énorme co(o)loc quand on sera vieux